Vie professionnelle : faites preuve de patience !

Dans mes accompagnements, je constate, parfois, l’impatience de certains de mes bénéficiaires. Ils aimeraient définir rapidement un projet professionnel, ne pas attendre un mois de plus avant d’avoir ce poste, etc.

Nous pouvons tous faire preuve d’impatience.

Cela est peut-être d’autant plus vrai que nous appartenons à une société où l’instantanéité est de mise.

Nombre de partages sur les réseaux sociaux vont dans ce sens : « j’ai décidé de… et en un an, j’ai réussi à gagner 10 000 € par mois« . Sans compter que n’importe quel résultat serait accessible en moins de 3 mois ! Perdre du poids, gagner plus d’argent, retrouver un nouveau travail, etc. Quel que soit le point de départ !

En matière d’évolution professionnelle, et ce, quel que soit le projet (ex : évolution hiérarchique, reconversion, changement de secteur, lancement de son activité, etc.), il en va de même. Pourtant, en faisant preuve d’impatience, le risque est d’abandonner trop tôt, ou de revoir ses ambitions à la baisse.

C’est pour toutes ces raisons que j’ai été interpelée par l’article de Dorie Clark « Votre carrière fait du surplace et vous avez l’impression d’être dans l’impasse ? Il est temps de faire preuve de patience stratégique »1. L’auteure pose le postulat que, en dehors des cas de stratégies perdantes, nombre d’individus ne font pas suffisamment preuve de patience stratégique. Et ce dernier mot est crucial : il ne s’agit pas simplement d’attendre !

Je vous partage ci-après les 5 étapes qu’elle préconise.

Conseil n°1 – Collectez les bonnes informations sur le chemin à suivre


Oseriez-vous partir en randonnée sans étudier un minimum l’itinéraire ? Sans évaluer le temps que cela peut prendre ? Sans savoir quoi emporter ?

Pour mener à bien votre projet professionnel, il en va de même. Dorie Clark conseille de partir à la recherche d’informations qui permettront de comprendre les conditions à réunir pour atteindre l’objectif, et, d’en déduire le temps qui vous sera nécessaire. J’insiste sur un point : ce temps vous est propre. Nous n’avons pas tous le même point de départ.

En effet, certains paramètres peuvent venir conditionner la réussite du projet professionnel porté. Pour illustrer :

  • Avoir développé telles compétences,
  • Avoir apporté un certain niveau de chiffre d’affaires à l’entreprise pendant 2 années consécutives,
  • Avoir réussi à élargir son portefeuille de clients (ex : nouveau secteur, directions générales, etc.),
  • Avoir conduit un projet stratégique jusqu’au bout,
  • Avoir occupé d’abord telle fonction pour pouvoir prétendre à ce poste de manager,
  • Avoir effectué une expatriation avant de pouvoir prétendre diriger une BU européenne,
  • Avoir un portefeuille minimum de 20 clients fidélisés pour dégager une première marge intéressante,
  • Avoir conduit 10 formations sur le sujet pour être reconnu(e) comme référent(e),
  • Avoir absolument suivi telle formation,
  • Se faire connaître de telle ou telle personne,
  • Etc.

Ainsi, qui peut nous aider à avoir une meilleure connaissance du chemin à parcourir et du temps que cela peut prendre ?
En premier lieu, de façon assez évidente, les sachants ! Ceux ou celles qui : ont réussi à développer une activité, ont conduit une reconversion dans le domaine, ont réussi à évoluer vers le poste souhaité en interne, etc.
Un conseil, n’hésitez pas à discuter avec plusieurs sachants, quand cela est possible, pour pouvoir identifier les dénominateurs communs à l’ensemble des expériences partagées avec vous.
Deuxièmement, il peut être intéressant d’échanger avec des pairs qui poursuivent le même objectif que vous.

Cette récolte d’informations vous donnera le cap à suivre, et servira de boussole pour vous questionner, régulièrement, sur votre situation et votre stratégie. Dorie Clark donne un exemple parlant dans son article : si vous savez que dans votre secteur d’activités, un chiffre d’affaires de 2 millions d’euros est généralement atteint dès la deuxième année, et qu’au bout de 18 mois, le vôtre est de moitié, c’est qu’il est important de vous réinterroger sur la stratégie à suivre.

Nota : l’auteure rappelle que ces conditions peuvent évoluer au fil du temps, et donc le timing également, mais c’est une première pierre essentielle à poser.

Conseil n°2 – Observez vos progrès au microscope


Il existe une longue phase dans le développement des technologies qui avancent à un rythme exponentiel (…) pendant laquelle les progrès effectués sont si minimes que, même s’ils doublent régulièrement, on a l’impression que rien ne se passe. Peter Diamandis et Steven Kotler appellent cela la « phase de tromperie », car elle en pousse beaucoup à ne pas prendre telle ou telle technologie au sérieux.

Dorie Clark1, p. 119

Pour Dorie Clark, ce principe est transposable aux évolutions professionnelles. A travers les 600 personnes qui ont suivi son cours sur la construction d’une réputation et d’une marque, elle a constaté qu’il leur fallait 2 à 3 ans pour commencer à observer des petits progrès par rapport à leur plan d’action. Et 5 ans pour les progrès les plus marquants !

Soyons honnêtes, cette temporalité peut démotiver bon nombre d’entre nous 🙂 Pour pallier cela, nous sommes donc invités à observer nos « gouttelettes de progrès ». Qu’est-ce donc ? Par exemple :

  • L’atteinte d’un objectif à court terme, aussi petit soit-il,
  • Une marque de reconnaissance par un client ou la hiérarchie,
  • Un réseau Linkedin qui grandit (en quantité / en qualité),
  • Le développement d’une des compétences nécessaires,
  • Un peu plus d’autonomie sur certaines missions, certaines activités,
  • Un client qui nous recommande à un autre client,
  • Le sentiment de se sentir de plus en plus à l’aise dans une posture,
  • Etc.

En des termes plus génériques, il s’agit de signaux qui démontrent que nous allons dans la direction que nous nous sommes fixées (et dans le calendrier associé).

J’ai conscience, en écrivant ces lignes, que cela pourra paraître « dérisoire » pour certain(e)s d’entre vous. Pourtant, ancrer ces victoires, aussi minimes soient-elles à vos yeux, constitue un exercice essentiel pour garder le cap.

Conseil n°3 – … sans oublier d’où vous êtes parti(e)


Les conscientiser c’est une chose. Ne pas les oublier en est une autre ! Ainsi, l’auteure nous invite à ne pas occulter nos succès, quand bien même ils nous paraissent acquis.
En effet, nous avons tendance à toujours pointer notre regard sur l’objectif final. Aussi, ces succès finissent par nous paraître normaux, voire banals.
Or, au moment où ils se sont produits, ils ne l’étaient pas, car nous n’étions pas celle ou celui que nous sommes devenus.

C’est ce que Dorie Clark appelle le changement de critères d’analyse. Il s’agit de notre propension naturelle à regarder nos exploits passés non pas avec les yeux de celle ou celui que nous étions, mais avec ceux d’aujourd’hui. Plusieurs exemples me viennent en tête :

  • Être très compétent dans son domaine, et « oublier » tous les efforts qui ont été fournis pour développer ses compétences,
  • Être à l’aise en posture commerciale, alors que les rendez-vous clients de la première année ont été rarement concluants,
  • Échanger aisément avec certains niveaux d’interlocuteurs, alors que nous étions impressionné(e)s les premiers mois,
  • Oublier le courage qu’il a fallu mobiliser pour se lancer dans cette activité entrepreneuriale,
  • Etc.

Bref, oublier les zones d’effort traversées pour rejoindre votre zone de confort actuelle.

Pourtant, garder le même point de départ permet de mieux apprécier le chemin parcouru. Cela permet de conscientiser les ressources et la force dont vous êtes capables. Autant de points d’appui pour la suite de votre parcours.

Conseil n°4 – Mobilisez votre capital social, à bon escient !


Il est humain d’évaluer nos progrès en nous comparant aux autres. Mais souvent, c’est la recette idéale pour se sentir mal. Nous devons faire la chasse à cette habitude néfaste et nous renforcer plutôt par le biais de relations interpersonnelles.

Dorie Clark1, p. 120

Pourquoi n’est-il pas pertinent de se comparer aux autres ? Parce que nous sommes tous différents. Oui c’est une lapalissade, importante à rappeler néanmoins !
Nous n’avons pas les mêmes parcours, nous n’avons pas la même personnalité, les mêmes ressources, le même âge, les mêmes clients, la même offre, etc. Dans le cas particulier bien français, nous pourrions ajouter « pas le même diplôme » 🙂

Dans ce chemin vers l’évolution professionnelle souhaitée, les autres peuvent constituer une ressource importante, à différents titres :

  • Ils vous aident à vous rappeler le sens que vous mettez dans cette quête (pourquoi cet objectif ?), principal prédicteur de réussite,
  • Ils vous aident à conscientiser le chemin parcouru et les progrès réalisés,
  • Ils vous rappellent l’importance de faire preuve de patience,
  • Ils vous rappellent vos points d’appui pour mener à bien ce projet,
  • Ils vous aident à réajuster la stratégie, soit par leurs conseils avisés de sachants, soit par leurs questionnements,
  • Etc.

Pour cela, il est important d’identifier qui sont les meilleures personnes ressources, par rapport à l’objectif que vous visez. De plus, il est important d’être disposé(e) à entendre ce qu’elles ont à vous dire. Même si cela est, sur le coup, désagréable ou douloureux.

Conseil n°5 – Acceptez de ne pas tout contrôler et soyez agile


Je ne vais pas vous l’apprendre, mais une vie professionnelle, c’est long (lapalissade n°2).

Les objectifs nous portent, ils nous aident à avancer, à nous motiver. Pour autant, personne ne peut dire où est-ce qu’il sera dans 1, 2, 3, 10, 20 ans. Tant d’évènements, professionnels et personnels, peuvent venir bouleverser les plans que nous avons en tête.
Par exemple, il peut s’agir de :

  • Une mutation de conjoint(e),
  • Un changement de stratégie de votre entreprise qui conduit à supprimer le poste que vous visiez,
  • Un secteur assez fermé, avec peu d’opportunités, et donc la nécessité de s’orienter vers « autre chose »,
  • Un évènement personnel heureux ou malheureux,
  • Etc.

Face à cela, la bonne nouvelle est qu’il est possible de trouver une autre place que celle que nous nous étions imaginée. Une place qui reste alignée avec ce que nous sommes.
Dorie Clark l’exprime d’ailleurs très bien, et c’est pour cela que je vous partage, en guise de conclusion, son propos très sage.

Personne ne peut prévoir les détours que prendra une carrière ou une vie. On ne peut pas non plus obtenir tous les postes pour lesquels on se porte candidat, ni récolter tous les lauriers qu’on convoite. Mais cela ne veut pas dire qu’il est impossible d’élaborer une forme de réussite professionnelle qui soit satisfaisante, car unique, et qui aille dans la bonne direction.

Dorie Clark1, p. 121

Sources

1Clark D., « Votre carrière fait du surplace et vous avez l’impression d’être dans l’impasse ? Il est temps de faire preuve de patience stratégique », Harvard Business Review, 12/2021-01/2022, p.117-121

Last Updated on 8 février 2023 by Daphnée DI PIRRO